L’affaire Vincent Lambert ; enquête sur une tragédie familiale / Ixchel Delaporte

L’affaire Vincent Lambert ; enquête sur une tragédie familiale / Ixchel Delaporte
Rouergue, 2020, 201 p.

# Enquête

Présentation

Fruit d’un minutieux travail d’enquête de plusieurs mois, l’auteur, ancienne journaliste à L’Humanité, a rencontré plusieurs dizaines de personnes pour écrire son livre. Son intérêt réside dans le fait d’entrer dans la complexité de l’affaire, pas tant dans la manière dont elle retrace l’affaire en elle-même, mais plutôt dans son enquête sur l’histoire de la famille de Vincent Lambert, bien avant son accident. Les témoignages recueillis permettent de mieux comprendre les sources lointaines et complexes du déchirement familial, sur fond d’engagement politique et religieux, dans un contexte d’abus sexuel de Vincent Lambert dans son enfance.

J’ai apprécié ce regard sur la plupart des protagonistes de cette situation. Comme l’on peut observer parfois dans des situations palliatives, le manque de communication a dès le départ créer des incompréhensions qui n’ont fait que s’amplifier. Ce livre fait toucher du doigt la complexité d’une situation singulière avec une famille déchirée, des procédures judiciaires qui se succèdent à chaque décision médicale en lien avec l’arrêt de traitement au titre de l’obstination déraisonnable de la loi de 2016. Tous, y compris les équipes soignantes peu médiatisées, ont vécu cette histoire comme un fracas, laissant le sentiment commun d’un immense gâchis. Cette « affaire Lambert » révèle les difficultés de notre société à affronter les questions éthiques de la fin de vie comme le soulève encore le débat actuel autour de l’euthanasie.

Par Isabelle Lafont, infirmière à COMPAS

Extrait

Le jour de l’enterrement, sans un regard ni un mot, chacun est passé devant le caveau pour se recueillir. Puis le cortège est reparti. Seul Joseph, le plus jeune frère de Vincent, a tourné les talons. Et loin de tous, a hurlé sa douleur. La famille élargie de Vincent s’était disputé son sort jusqu’au déchirement suprême, jusqu’à sa mort. Lui qui n’avait jamais eu la première place dans cette trop grande famille. Lui, l’enfant meurtri, décalé. Lui dont chacun redoutait en silence une catastrophe, un danger sous-jacent et imminent. La braise sous la cendre.